Beverly a pris un congé pour contribuer à la mise en place de notre programme d’aide juridique. Diane a fait appel à des experts-comptables judiciaires qui se sont portés volontaires. Heather, sobre depuis trois mois et portant une boîte de beignets en guise de geste de paix, s’est portée volontaire. Elle anime désormais nos groupes de soutien et partage son histoire : comment Walter a exploité sa dépendance et ses insécurités.
Dix-huit mois après cette nuit à l’aire de repos, je me trouvais dans mon bureau, face à un mur couvert de cartes de remerciements et de photos. Quatre-vingt-sept femmes et leurs enfants avaient trouvé refuge grâce à notre fondation. L’une des victimes de Walter, une veuve âgée qu’il avait escroquée, est devenue notre plus grande donatrice.
La pluie tombait de nouveau dehors, tambourinant doucement contre les vitres de la maison en grès brun qui abritait désormais espoir et seconde chance. Je repensais à cette nuit-là, à cinquante kilomètres de chez moi, debout sous l’averse tandis que Walter s’éloignait, si confiant de m’avoir brisée. Il pensait m’apprendre le pouvoir et le contrôle. Au lieu de cela, il m’a appris que la cruauté engendre sa propre destruction, que chaque action a des conséquences, et que parfois, la personne qu’on abandonne sous la pluie a déjà vu venir la tempête et s’est préparée en conséquence. Son acte de cruauté calculée a été le catalyseur qui lui a permis de sauver des femmes dont il n’avait jamais cru qu’elles méritaient d’être sauvées. La dernière leçon, celle que Walter n’a jamais vue venir, ne concernait ni l’obéissance ni le respect. Elle concernait la transformation. Il a essayé de me laisser impuissante dans la tempête. Je suis devenue l’œil du cyclone.